Interview de Françoise Le Jallé
Françoise Le Jallé : "Accompagner les étudiants handicapés pour qu'ils trouvent leur propre chemin"
Françoise Le Jallé est Chargée de Mission Handicap depuis 3 ans. Avec son équipe, elle a réussi à donner une visibilité à sa mission, ainsi qu'une vraie place aux personnes handicapées dans l'Université de Strasbourg, même s'il reste beaucoup à faire. Les projets de la mission, d'ailleurs, ne manquent pas !
Quel bilan tirez-vous de ces trois années d'activités ?
Le plus important, c'est de constater qu'aujourd'hui, la Mission Handicap a vraiment une visibilité. Elle est bien identifiée par les étudiants handicapés, mais aussi par les personnels des composantes. Or, c'est important, car les étudiants handicapés sont dans les composantes. Elles sont en première ligne pour les accueillir, les aider, prendre en charge leurs spécificités.
Nous avons mis beaucoup d'énergie à engager un travail sur l'image des personnes handicapées. Ainsi, dans le cadre de la Semaine pour l'emploi des personnes handicapées, nous avons lancé un concours de scénarii sur le thème "Handicap et emploi : et vous, vous en diriez quoi ?", ainsi que la réalisation de clips "décalés" mettant en scène des personnes handicapées au travail. Cette action a reçu récemment le prix Handi-friends (voir l'article ci-dessus). C'est à la fois une grande satisfaction pour nous, et cela a renforcé nos liens avec nos partenaires en interne (la Direction des Usages du Numérique - DUN) et à l'externe (le Crédit Agricole).
Ces résultats, on les doit surtout à l'implication et au dynamisme de deux personnes qui travaillent à la Mission Handicap : Fabienne Rakitic, coordinatrice et Jackie Didierjean, chargée d'accueil.
Quel objectif politique sous-tend votre action passée et à venir ?
Notre objectif est de développer l'autonomie des étudiants. Il faut qu'ils puissent trouver leur propre voie, leur propre chemin, dans le respect de la dignité humaine. Ainsi, nous mettons tout en oeuvre pour les accompagner dans un processus global allant de l'accès au savoir jusqu'à l'élaboration de leur projet professionnel sans les marginaliser ou les victimiser. C'est un équilibre délicat ! Mais ça marche. Nous constatons régulièrement le développement d'une solidarité entre étudiants valides et handicapés, entre les étudiants handicapés également.
Pour améliorer cette autonomie, nous nous efforçons de sensibiliser un maximum de personnes dans l'université à la présence et aux besoins des personnes handicapées. L'idée, c'est que leur prise en charge ne passe pas systématiquement par nous, mais soit l'affaire de tout un chacun dans l'établissement. Finalement, c'est la prise en compte du particularisme d'un étudiant. Les particularismes existent en dehors des handicaps.
Quels sont vos projets ?
Le plus imminent est justement en lien avec cette prise en compte "décentralisée" de la personne handicapées : elle concerne la constitution d'un réseau de personnes ressources dans les composantes. Nous sommes en pleine construction de ce réseau, qui devrait être opérationnel en septembre prochain.
Nous travaillons également sur l'accessibilité physique des bâtiments universitaires. C'est un peu compliqué, surtout dans les bâtiments anciens. Egalement, sur l'accessibilité numérique, ce qui peut être une aide précieuse aux études pour pallier certains handicaps. Ainsi, la DUN, avec le Service de Formation Continue et les Sciences de l'Education, développe une solution pour déficients visuels, actuellement testée par une étudiante en Licence Pro.
Le travail sur l'image des personnes handicapées passera, cette année, par un projet artistique autour de la photo : "Envisage-moi". C'est le photographe Eric Vassoler, qui a beaucoup travaillé sur la notion d'étrangeté, qui doit réaliser une série de portraits d'étudiants et de personnels handicapés.
Les personnels handicapés, justement, sont également au centre de nos préoccupations les plus proches : nous travaillons, dans l'université, à l'identification des postes qui pourraient leur convenir, à l'élaboration d'un protocole pour embaucher des étudiants handicapés. Enfin, toujours dans le souci de travail sur l'image, nous allons produire, avec la DRH, une série de bandes dessinées présentant un personnel handicapé et ses conditions de travail. La première est terminée (voir l'article sur cette initiative), mais nous comptons en sortir une tous les trimestres.
Propos recueillis par Caroline Laplane
L'Actu n°43 du 20 mai 2011