L’Euro 2016, loupe et miroir de nos sociétés européennes

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13/06/2016

En guise d’échauffement, c’est sous l’angle sociologique que le colloque "Ce que l'Euro de football 2016 nous dit de l'Europe" a abordé cette compétition ultramédiatisée, à travers laquelle transparait l’image et les transformations de nos sociétés contemporaines.

Pendant un mois, l’Europe va vibrer au rythme des buts, des défaites et des victoires du championnat d’Europe des nations, l’Euro 2016. Deux millions de spectateurs et huit millions de téléspectateurs sont annoncés. L’évènement tombe à point pour William Gasparini, sociologue au sein du laboratoire Sport et sciences sociales (EA 1342). Le chercheur a organisé le cycle de conférences Ce que l’Euro 2016 nous dit de l’Europe dans le cadre de sa chaire Jean Monnet1, la première consacrée à l’étude européenne du sport. A travers ce programme de recherche, c’est la création d’une nouvelle approche scientifique internationale et interdisciplinaire qui est envisagée. « L’objectif n’est pas d’analyser ce que l’Europe fait au sport, précise le chercheur, mais bien de comprendre comment le sport produit des rapports ordinaires à l’Europe et une forme d’européanisation des citoyens. »

Découvrir « l’autre Européen »

Dès lors, l’art du ballon rond apparait comme un objet d’étude à part entière. « Le football est un produit de l’Europe intimement lié à son histoire politique, sociale et économique », confirme William Gasparini. Et plus qu’aucune autre compétition européenne de football, l’Euro est aussi une fenêtre ouverte sur la représentation sociale des pays participants par le biais de leurs équipes nationales. « Par exemple, la sélection allemande est restée monoculturelle jusque dans les années 2000. Avec le changement du code de la nationalité, la Mannschaft intègre désormais des joueurs d’origine turque, ghanéenne ou russe », observe William Gasparini. Pour chaque spectateur, l’Euro 2016 donne ainsi l’occasion de découvrir « l’autre Européen ».

La parenthèse enchantée "black-blanc-beur"

Le football comme vecteur d’intégration reste cependant sujet à caution et chaque représentation nationale nécessite d’être contextualisée. L’Euro 2016 agit ainsi comme une loupe concentrant à travers son grossissement médiatique la diversité des rapports sociaux et des enjeux actuels en Europe. « Lorsque l’on se souvient de la parenthèse enchantée de l’équipe de France "black-blanc-beur" des années 1998 à 2000, l’ampleur de la crise économique et du chômage était encore loin de celle que l’on connait aujourd’hui et l’idée de cohésion nationale existait jusqu’au sein du gouvernement », rappelle William Gasparini. Et bien que les vertus sociales du football soient communément admises, son registre médiatique expose aussi ses nombreuses dérives : corruptions, scandales, stéréotypes racistes, montée des communautarismes…
Des dérives auxquelles s’ajoutent dorénavant les enjeux sécuritaires suite aux attentats terroristes qui ont secoué l’Europe en 2015 et plus particulièrement la France qui accueille la compétition.
Et le chercheur de souligner : « Même si l’on n’est pas passionné par le football, on ne peut pas échapper aux débats et polémiques suscités par cette compétition. La question identitaire levée par l’absence de Karim Benzema en équipe de France en est un exemple. D’une manière ou d’une autre, vous êtes amenés à vous y intéresser ».

Guillaume Thépot

1 Chaire Études européennes du sport (2015-2018), attribuée par la Commission européenne dans le cadre du programme Erasmus+

Pour aller plus loin :

Fondation Université de Strasbourg
Investissements d'Avenir
Ligue européenne des universités de recherche (LERU)
EUCOR, Le Campus européen
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